Méridienne, courbe en "8" & Analemme

La Méridienne et le cadran solaire

Le cadran solaire est certainement le système de mesure du temps le plus ancien. L'art de concevoir, calculer et tracer des cadrans solaires est appelé "gnomonique".

L'une des composantes principales du cadran solaire est la "méridienne", la ligne qui marque le passage quotidien du soleil au zénith, lorsque l'ombre du style est la plus courte, correspondant alors au "midi vrai" du lieu.

Heure locale

Jusqu'au début du XVIIIème siècle l'heure était une donnée locale, indiquée par le cadran solaire. Chaque passage sur la ligne méridienne du cadran indiquait alors le midi local, le reste de la journée étant divisé en parts égales. Il n'y avait donc pas de synchronisation entre les heures pour les différents lieux, chacun ayant son propre midi local, qui dépend de sa longitude.

De plus, le temps effectif écoulé entre deux passages du soleil au zénith, donc deux passages sur la méridienne, n'est pas une constante mais varie au cours de l'année (voir à ce sujet notre article sur l'équation du temp). Donc la durée d'une journée, et d'une "heure locale", étaient variable, en fonction du jour de l'année.

Essor des méridiennes et cadrans solaires

L'âge d'or de ces méridiennes "d'usage" se situe du XVIIème au XIXème siècle. On les trouve sur les églises, hôtels particuliers, châteaux, places, etc.

On doit ce développement des méridiennes et cadrans solaires aux progrès de l'horlogerie. Christian Huygens a inventé l'horloge à pendule dès 1660 et il est l'un des candidats à la première utilisation du ressort spiral pour réguler le temps dans une montre (voir notre article "Ressort spiral & balancier"). Les possesseurs de montres pouvaient alors venir régler leur instrument sur le cadran solaire, en particulier à l'heure de midi.

"Grandes Méridiennes" à l'usage des astronomes

Pour les astronomes, des cadrans solaires de plus grande taille et plus élaborés permettaient cependant de définir une temporalité précise pour les événements astronomiques. Ces méridiennes, dites "Grandes Méridiennes", indiquent non seulement le midi vrai mais également les dates des solstices et des équinoxes, la déclinaison journalière du soleil à midi, l'obliquité de l'écliptique etc... Ce type de cadrans se trouvent dans des lieux protégés, observatoires ou églises.




Gnomon antique


Réglage de l'heure sur la méridienne équipée d'un gnomon à oeilleton.
Source: La Gnomonique pratique ou l'art de tracer les cadrans (Bedos de Celles)



Le "temps moyen" la courbe en 8 et l'analemme

L'essor du chemin de fer souligne la nécessité d'une "heure moyenne", dont la durée reste constante tout au long de l'année. De plus il est indispensable de caler les différentes heures locales sur une heure civile commune sur un large territoire.

Pour chaque lieu, l'écart entre l'heure solaire vraie et l'heure moyenne (heure légale) dépend d'un part de la différence de longitude avec le lieu de référence pour l'heure moyenne et d'autre part du jour de l'année. On trouve la correction pour le jour de l'année dans des "tables d'équation" calculées par les astronomes.

On peut également représenter ces écarts sur les cadrans solaires, on trace alors une ligne en forme de 8 de part et d'autre de la méridienne, indiquant le midi moyen pour chaque jour de l'année. La forme exacte de cette courbe en 8 est propre à chaque lieu et chaque type de cadran solaire (vertical, horizontal, etc.)

Les cadrans solaires affichant cette courbe en 8 sont appelés "analemmatiques" puisqu'ils donnent une représentation de la version plus universelle de cette courbe en 8, appelée "analemme". L'analemme représente la déclinaison (hauteur angulaire du soleil dans les coordonnées équatoriales) sur l'axe vertical en fonction de l'équation du temps sur l'axe horizontal.

Courbe, appelée analemme, représentant l'équation de temps (décalage entre heure vraie et heure moyenne) sur l'axe horizontale et la déclinaison (hauteur angulaire du soleil dans les coordonnées équatoriales) à midi vrai sur l'axe vertical.

L'analemme ainsi que les courbes en 8 sur les cadrans analemmatiques sont liés à l'équation de temps (voir notre article sur l'équation de temps). Si l'on replie l'équation de temps et que l'on remplace l'échelle horizontale des jours de l'année par la déclinaison solaire alors on retrouve l'analemme.

On peut comprendre les points caractéristiques de l'analemme en faisant le lien avec l'équation de temps, on note alors les caractéristiques suivantes:

  • Les points maximum et minimum sur l'échelle verticale (déclinaison) correspondent aux dates des solstices. Puisque la déclinaison est mesurée dans le repère équatorial elle varie entre -23.43° et + 23.43°, ces valeurs correspondent à l'angle de l'écliptique dans les coordonnées équatoriales.
  • La courbe de l'analemme croise l'axe horizontal (déclinaison = 0) aux dates des équinoxes
  • La courbe de l'analemme croise l'axe vertical (équation de temps = 0) en 4 points qui n'ont pas d'interprétation simples puisque l'équation de temps est la somme de plusieurs contributions (composantes liées à l'élliptique et à obliquité).
  • Le croisement de la courbe en 8 de l'analemme sur elle-même se produit le 29 août et le 11 avril, mais il n'a pas de signification astronomique particulière.

La première utilisation de cette courbe en huit sur les méridiennes et cadrans solaires est généralement attribuée à Jean-Paul Grandjean de Fouchy (1707 - 1788). La littérature mentionne en particulier la réalisation d'une courbe en huit dans les années 1730 par Fouchy chez le compte de Clermont.

Position du soleil dans le ciel

Si l'on regarde directement la position du soleil dans le ciel à une heure légale précise (par exemple 12h) tout au long de l'année on retrouve une courbe en 8, correspondant à celle qui est générée sur le cadran solaire par la projection de l'ombre du style.

Position du soleil dans le ciel à différentes heures de la journée, à Londres. Chaque courbe en 8 représente une heure civile, et le soleil met une année pour parcourir l'intégralité d'une courbe en 8. Source: B. Beckers

 



L'astronome Jean-Paul Grandjean de Fouchy (1707 - 1788)



Sources

Revue d'Histoire des Sciences 2008, "L'aspect gnomonique de l'oeuvre de Fouchy: la méridienne de temps moyen", D. Savoie

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